27/08/2018

Conte magique pour enfants psychotiques.

Que celui qui n'a jamais eu pitié du Capitaine Crochet aille s'enterrer.

Edition : Librio
Publication : 2013
Pages : 143

Résumé :
Un bien étrange personnage vient réveiller Wendy et ses deux frères : un enfant vêtu de feuilles, à la recherche de son ombre. Qui est-il et d'où vient-il donc, ce garçon qui ne connaît pas son âge et ignore ce qu'est un baiser ? Intrigués par Peter Pan et la lumière tintinnabulante qui l'accompagne où qu'il aille - la fée Clochette -, Wendy, John, et Michael n'hésiteront pas longtemps à le suivre au pays de l'Imaginaire, l'Île merveilleuse où les Enfants perdus, le capitaine Crochet et de nombreuses aventures les attendent.



Première chose, j'ai jamais aimé les innombrables et diverses adaptations de cette histoire, qu'il s'agisse du Disney, qui n'est clairement pas l'un de mes préférés, ou des nombreux films, y compris celui qui est centré sur l'auteur, James Barrie. Voilà pourquoi j'ai mis autant de temps à lire ce livre.

Ce qui m'a pourtant décidé à tenter cette aventure, c'est cette vidéo :


Alors merci infiniment à Lemon June qui a eu la curiosité d'ouvrir cette bombe atomique puis d'en parler, sans ça je crois que je m'y serais jamais intéressée.

Oubliez toute l'espièglerie qu'on colle généralement à cette histoire et toute l'ambiance bonne enfant, parce que, clairement, c'est mensonger. Ce livre est cruel, vraiment cruel, à la psychologie trouble. On est avec un personnage qui est un enfant depuis tellement longtemps, incapable de grandir, qu'il en est devenu totalement insensible.

Peter Pan vit dans un présent éternel, une ligne plate, sans aucune courbe où tout n'est que jeu. Il ne grandit pas. N'évolue donc pas. N'apprends, de ce fait, absolument pas de ses erreurs. C'est un enfant a qui on a donné le contrôle, trop de contrôle. Alors quand ça se passe pas comme prévu, gros caprice. Et allez donc provoquer un caprice chez un enfant armé d'une épée !

L'auteur nous fait comprendre d'entrée de jeu que ce sera sombre alors que l''île de l'Imaginaire n'est même pas encore mentionnée. En fait, dès que Peter apparaît. C'est d'abord à la mère de Wendy, John et Michael qu'il se montre, et cette chère Mme Darling (qui tient la place la plus affreuse dans l'histoire, mais je vais y revenir) a une frousse de tous les diables en apercevant, dans l'obscurité de la chambre de ses enfants, le sourire de cette canaille qui vient d'entrer par la fenêtre. En même temps si un inconnu rentrait dans la pièce où je dors par la fenêtre en souriant, moi aussi j'aurais la trouille, j'avoue.

Ce genre de personnage comme ce gamin, uniquement préoccupé par l'image qu'il renvoie aux autres, m'horripile au plus haut point, mais l'auteur ne s'est pas contenté de ça. Il a donné à Peter un côté aussi très vulnérable. Il ne veut pas grandir, certes, il est bon à enfermer, d'accord, mais il est aussi perpétuellement à la recherche d'une maman ! Il ne l'avouera jamais clairement, et c'est dit dans le texte de façon totalement inconsciente de sa part, mais c'est en fait quelque chose qui le frustre énormément ! L'une des seules choses qu'il n'obtiendra jamais vraiment : une mère. Et c'est peut-être pour ça qu'il est aussi cruel avec les adultes, pour ça qu'il ne laissera jamais grandir les Enfants Perdus, parce que c'est quelque chose qu'il se refuse. Dès que ceux-ci commencent à devenir trop âgés, vous savez ce que fait ce grand malade ?! Il les tue !!!

En vrai j'ai adoré ce garçon.

C'est parce qu'il veut une figure maternelle qu'il s'en va chercher, par une belle nuit, Wendy et ses frères. Rien que cette scène aussi m'a bien fait flipper. Et pour la convaincre de le suivre, Peter Pan utilise des arguments imparables ! Wendy, en devenant la maman des Enfants Perdus pourra, je cite : repriser leurs habits, leur raconter des histoires, et les border. Elle, folle de joie, elle accepte.

Pardon ?

Quand je disais que ce personnage était une grosse gourdasse dans le dessin animé et dans le film de 2003, bah j'étais loin du compte. Mais je reconnais que c'est pas de sa faute à elle, c'est celle de l'auteur. C'est le gros point négatif de ce livre qui fait que je n'ai pas eu de coup de cœur, je ne peux pas passer à côté de ça. Je ne sais pas ce qu'il en était en réalité car le peu d'informations biographiques que j'ai trouvé sur James Barrie n'en parlaient pas forcément, mais de mon point de vue ce livre transpire un putain de gros machisme qui pue ! Ce gars semblait avoir une idée toute faite de ce qu'était la femme : un objet qui pond, fait la cuisine, coud, et ferme sa gueule. Je sais bien que c'est malheureusement l'époque qui veut ça, mais ça fait quand même bien chier ! Et celle qui en fait le plus les frais dans ce texte, c'est même pas Wendy, c'est Mme Darling.

Elle passe son temps à attendre ses enfants, sans rien faire d'autre que se lamenter (ce qui est aussi un peu le cas de son mari, j'dois dire) mais l'auteur décrit son état d'un ton si froid ! Comme s'il voulait convaincre le lecteur que c'est pas grave, Mme Darling on peut s'en foutre royal. D'ailleurs la façon dont il l'éjecte de l'histoire à la fin résume assez bien ce qu'il pensait lui-même d'elle : "Mme Darling est morte, déjà, et oubliée" p.139. Merci, ça fait plaisir ! Sans compter que Wendy qui grandit devient encore plus intellectuellement limitée ! Nan mais qui laisserait partir son unique fille avec un enfant qu'elle sait très cruel, dangereux et insensible ?!

J'accorde peut-être trop d'importance à l'image de la femme dans la littérature, je le reconnais, mais là il s'agit d'un conte, donc potentiellement lisible par des enfants (suis pas sûre qu'il ait été à destination d'un jeune public de base, par contre…) Et on ne va pas offrir à des gosses un tel personnage, ni même leur envoyer comme message que leur maman ne servent qu'à essuyer la bave qu'ils ont sur le menton et leur torcher le cul avant de crever seule comme des idiotes !

Ça m'a gavée, vraiment.

Heureusement qu'il y avait le personnage du Capitaine Crochet pour équilibrer, parce que sinon j'aurais tout à fait pu pousser juste une grosse gueulante sur ce texte. L'un des meilleurs personnages, et le plus développé surtout avec Peter. Clairement, ces deux-là sont pour moi les deux faces d'une même pièce. Ce qui les lie dans ce texte est très fort, une dualité superbe qui fait d'eux des Némésis parfaits. L'un ne va pas sans l'autre ! D'autant qu'ils sont tous les deux enfermés dans un même désir qui les enchaîne sur cette même ligne dont je parlais plus haut, ce même présent éternel, cette temporalité figée. Peter parce qu'il ne veut pas grandir mais désire tout de même une maman (une mère est un peu ce qui fait de nous des enfants, non ?), et Crochet parce qu'il est jaloux de l'éternelle jeunesse de son ennemi, mais l'envie aussi en même temps alors que lui, il est adulte, et qu'un retour en arrière est impossible. Pis ils sont aussi cruels l'un que l'autre, le pirate n'hésitant pas à zigouiller ceux de son équipage qui lui pompent l'air, comme ce gosse se débarrasse des Enfants Perdus qui grandissent.

Si vraiment je voulais prendre les choses plus largement, je dirais qu'en fait, psychologiquement, James Barrie a tenté de décrire le même état de désir impossible à assouvir, mais à deux âges différents. Ce qui voudrait dire (pour moi, hein, et c'est une théorie à laquelle je tiens !), que Peter et Crochet sont en fait un seul et même personnage. De façon imagée bien sûr. D'ailleurs, l'une des scènes qui clôture la fin de la lutte entre ces deux-là, qui m'a bien fait flipper au passage, vient presque valider cette théorie. Oui, presque, faut pas abuser non plus.

Mais je vous la citerai pas ce coup-ci. Par contre Lemon en parle dans sa vidéo si vous voulez, l'ennui c'est que ça risque de vous spoiler un peu. À vous de voir, je vous laisse le choix !

Pour conclure, un livre que j'ai adoré, que je relirai sûrement, que je garde, donc, et qui ne manquera pas de me révéler d'autres choses chaque fois que je le rouvrirai, j'en suis persuadée !

https://www.livraddict.com/biblio/livre/peter-pan-roman.html

Ça m'aura pris 15 jours pour écrire toutes ces conneries. Ce bouquin je l'ai lu lors de ma quatrième participation au Week-end à 1000, et depuis je me prends le chou. Et tout ça pour dire des choses que des dizaines de personnes ont sûrement dit avant moi, en plus.

Allez, bonne semaine à tous !

C'est moi ou c'est la première fois que je finis un article en glissant un mot sympa et poli ? Comme quoi, mieux vaut tard que jamais.

Tiens :
Je sais pas si j'en suis remise de celui-là encore.
J'ai lu le tome 3 des Otori !
J'ai toujours pas réussi à regarder d'autre Drama depuis celui-là !

10/08/2018

Week-end à 1000 #4 (basique, je sais, mais j'en ai ras-le-pion de me casser les miches pour un foutu titre !)

Et tout ça avec beaucoup de poésie, s'vous plaît ! (et même s'il vous plaît pas, d'ailleurs)

https://www.facebook.com/groups/548425825168377/
(en cliquant sur l'image, t'arrives direct sur le groupe FB du challenge, c'est magique !)

Je dois avouer que j'ai hésité pour celui-là, je suis en vacance alors je lis déjà beaucoup, je me disais que j'aurais sans doute pas la même énergie (dès que j'ai les doigts de pied en éventail, je me transforme en gros marshmallow) mais je ne pense pas pouvoir participer au prochain et ça me ferait chier d'attendre trop longtemps. Alors voilà, le Week-end à 1000 revient !

La dernière fois que j'ai osé ce challenge sans foutre de manga dans ma PAL c'était lors de ma première participation, et j'avais foiré. Je suis pas idiote, je sais bien que si j'ai réussi à ma deuxième et troisième participation, c'est parce que j'avais un truc ultra rapide à lire dedans à chaque fois. Mais pas cette fois :

(on en arrive à plus de 1000 si j'ai bien compté)

Autre nouveauté aussi, je crois que c'est la première fois que je mets un livre déjà commencé dans ma sélection.

Rappelez-vous, le principe est simple : lire 1000 pages en un week-end. Ça commence aujourd'hui à 19h et ça fini dimanche à minuit.

Comme à chaque fois, je ferai un update sur cet article dès que j'aurai terminé, et peut-être que je chroniquerai certains bouquins si je les ai aimé.

À dans 2 jours !

Update du 12 août à 19h11
(ah, ce talent !)

Je m'attendais pas à m'en sortir aussi bien, surtout que j'ai eu une belle surprise et pris plus de temps que prévu à lire un livre, sans oublier celui que j'ai abandonné en cours de route, mais finalement tout s'est bien passé ! Les 1000 pages ont été atteintes à 19h, une heure plus tôt que lors de la précédente cession, et sans même un manga dans la PAL s'il vous plaît !

Comment ça s'est passé ?

Vendredi à 22h je n'avais lu que 100 pages de ce qu'il me restait à lire de "Toutes blessent la dernière tue".
Vendredi à minuit : sans pression, j'ai lu 100 pages de plus et suis allée me coucher.
Samedi à midi, je finis mon livre, j'ai donc 330 pages lues au compteur.
Samedi à 16h : 410 pages. Je commençais à me dire que j'allais faire un flop.
Samedi à 20h : 473 pages. Je finis la lecture de "Peter Pan", une pépite de conte cruel que j'ai pris le temps de savourer !
Samedi à 23h30 : 603 pages. J'ai lu très rapidement les 130 premières pages de "La septième vague" avant d'abandonner, et je vais me coucher.
Dimanche à 11h : je referme "L'oiseau Canadèche", 718 pages lues en tout.
Dimanche à 14h30 : 820 pages. Je remplace l'abandon par le tome 6 des Aventuriers de la mer, dont je lis les 102 premières pages.
Dimanche à 19h : je finis ce challenge avec Rose Darcy et le tome 1 de Déploie des ailes qui fait 192 pages, j'atteints donc le score glorieux de 1010 pages lues en 48h.

Et les livres alors ?

Je vais pas revenir sur "La septième vague", ou alors un peu : si la débilité profonde et crasse de ces 2 personnages creux m'avait bien amusée avec le tome 1, je ne l'ai cette fois-ci pas supporté, et je sentais venir la grosse répétition d'événements idiots, alors j'ai abandonné. Voilà un bouquin que je vais vite oublier.
Le dernier Karine Giebel, que je voulais à tout prix lire, a été une déception. L'auteure s'est attaqué à un thème dur et audacieux (l'esclavage moderne) mais en a trop rajouté dans la violence et la cruauté pour que ça ait finalement un impact, d'autant que ça ne mène à rien à la fin… que j'avais deviné au début du dernier tiers. Une déception.
J'ai passé un bon petit moment avec "L'oiseau Canadèche", récit de vie un peu perché, avec un canard attachant et des personnages originaux.
J'ai reposé mon cerveau avec "Cœur sucré" de Rose Darcy, une histoire drôle dans un univers original, une romance sans prise de tête que j'étais quand même contente de finir parce que j'avais pas non plus envie de me transformer en guimauve ! La douceur, c'est dangereux.
Et dans "Peter Pan", y'en a pas des masses ! Ce conte cruel pour enfant psychotique est passé pas loin du coup de cœur. Un petit quelque chose très dérangeant pour moi me faisait pas mal grincer des dents, mais le reste est une bonne surprise ! La chronique dans quelques jours.
Quant au tome 6 des Aventuriers de la mer, dont je vais m'empresser de reprendre la lecture demain, c'est comme toujours un délice à lire !

Mais bon là pour ce soir, je vais zapper un peu la lecture et regarder un film de bourrin avec plein de choses qui explosent, ça va me faire du bien.

09/08/2018

Je sens venir la bonne déprime.

Je commence à peine cet article et je suis déjà certaine que je vais m'engueuler avec moi-même, quelque chose de violent !

En plus, à tous les coups ça va partir dans tous les sens, comme de coutume. J'ai prévu de faire un truc construit, mais à mon avis l'échafaudage va se casser sévèrement la gueule. Enfin, c'est pas comme si vous aviez pas l'habitude, hein ?

Éditeur : Archipoche
Parution : 2016
Pages : 568

Résumé :
Recueilli par une grand-tante qui le dédaigne et lui promet un destin funeste, Jude Fawley, orphelin, ne trouve de sympathie qu'auprès de son maître d'école. Mais celui-ci l'abandonne à son tour pour suivre ses études à Christminster…
Rêvant de l'imiter, le jeune homme apprend le latin et le grec en autodidacte, gagnant sa vie comme tailleur de pierre. Mais l'appel de la chair a raison de ses aspirations : il se résigne à épouser Arabella, une paysanne qui n'entend rien à sa soit d'instruction.
Condamné par son origine modeste, Jude l'est encore par les liens d'un mariage forcé, puis par l'interdit pesant sur son amour illicite avec Sue, sa propre cousine. Décrivant "la guerre terrible qui se livre entre la chair et l'esprit", Thomas Hardy s'en prend avec vigueur aux lois sur le mariage, qui retardent l'accomplissement du destin de Jude.

Sachez qu'au moment où j'écris, là, j'ai pas totalement fini le livre, il me reste un peu plus de 100 pages à lire, mais je pouvais pas attendre, fallait que je me lance maintenant. Je sais pas trop pourquoi, et on s'en fout.

Le contexte c'est celui de l'Angleterre rurale de la fin du XIXè, typiquement le genre que j'aime vous le savez sans doute maintenant. Mais les auteurs de cette époque que j'ai lu jusqu'à présent (à savoir Austen, les sœurs Brontë et Trollope) ne m'avaient absolument pas habituée à ça, mais genre absolument pas du tout non.

Ce livre est d'un pessimisme à chialer ! C'est horrible ! Avec AusBroTroll (hein ?! Alors là, si vous avez pigé, vous êtes balèze) il y a toujours une lueur d'espoir, quelque chose de bien arrive toujours aux personnages à un moment donné, et ça fait plaisir parce qu'on a l'impression de sortir la tête du trou. Pas là. Pas avec Hardy.

Du coup, ça m'a révoltée, ça m'a indignée à un point dingue ! J'en suis arrivée à me taper le front avec le livre en retenant un cri de colère (ça va pas m'arranger, je suis d'accord), et les principaux responsables des sévices que je me suis infligée, se sont les personnages. Parce qu'ils laissent glisser ces cons ! Ils encaissent, et quand ça devient trop dur à supporter, ils partent. Et ça me révolte parce que je suis plutôt du genre à rentrer dans le gras de ceux qui m'emmerdent.

OK, là je viens de jeter un coup d'œil à mon plan et je me rends compte que j'aurais dû commencer en vous parlant de l'auteur pour vous aider à mieux comprendre. Génial, c'est déjà le bordel.

L'auteur, donc : clairement féministe, défenseur de Darwin et passionné d'archéologie, ayant perdu la foi sans réussir totalement à en faire le deuil, il a pourtant connu, avec ses premiers livres, un joli succès à l'époque. Mais "Jude l'obscur" est tellement moderne et scandaleux pour les gentils hypocrites Victoriens qu'il est publiquement brûlé (le livre hein, pas l'auteur…) et vendu sous le manteau par les éditeurs/libraires qui ont assez de couilles pour le faire, enroulé dans du papier pour le cacher. Si si. Hardy provoque une telle polémique alors, et il en prend tellement dans la tronche, qu'il arrêtera totalement d'écrire des romans après ça, et se consacrera à la poésie, et au théâtre.

Quand j'ai su ça grâce à cette vidéo, je me suis dit qu'en fait c'est pas plus mal que j'ai pas vécu à cette époque. Là, je remercie pas AusBroTroll, à cause de qui je m'étais totalement voilé la face.

Bref, j'en reviens à ce que je disais avant cette parenthèse. À cause du titre, je m'attendais à un personnage sombre, torturé par l'ambition et son désir d'instruction que j'étais sûre d'apprécier parce que j'aime les gens mauvais. Sauf que c'est pas du tout ça. Jude est un personnage de l'ombre qui a un énorme désir d'apprendre, de s'élever et de s'extraire de sa condition, mais que le moindre coup met à terre et qui se résigne beaucoup trop facilement. De l'ambition, c'est clair qu'il en a, mais il ne se donne pas les moyens d'accomplir son rêve. D'accord, à l'époque tout est contre lui car l'instruction est littéralement refusée aux non-privilégiés qui doivent se contenter de rester à leur place, mais plutôt que de le rendre hargneux, cette réalité dégueulasse le laisse démoralisé, passif. Un gros, gros merde à ce personnage qui, s'il me plaisait au début, m'a tellement déçu au bout d'un moment que je suis limite contente de ce qui lui arrive. En sachant aussi que ça m'a énormément touchée. En fait, j'ai le cul entre deux chaises, là. Ce qui lui arrive est en parti à cause de l'ostracisme social de l'époque, et ça me révolte !

Sue, que j'ai d'abord pris pour un personnage résolument moderne, féministe et fort, n'a tellement pas conscience de l'être qu'elle finit par devenir juste terriblement égoïste après être passée par une phase de coquetterie terrible ! Avec ses "je t'aime moi non plus" à répétition, elle m'a très vite énervée. Mais là encore, je sais que cette évolution (régression, j'ai presque envie de dire) est due à l'époque dans laquelle elle évolue. J'ai le sentiment que Hardy a attaché moins d'importance à la façon dont serait perçue cette femme qu'aux raisons qui la rendent aussi insaisissables, c'est-à-dire les lois du mariage. Le personnage lui-même pose, dans le dernier tiers du livre, une question très pertinente : "pourquoi les femmes ne pourraient-elles pas choisir le père de leurs enfants ?" Putain, si ça c'est pas un gros pavé jeté dans la marre, je sais pas ce que c'est ! L'auteur critique très ouvertement le caractère sacré du mariage qui obligeaient les femmes, considérées à cette époque comme des êtres de seconde classe ne disposant même pas de leur corps et appartenant totalement à leur père, puis à leur mari, à obéir sans rien dire et à considérer cet état de fait comme totalement normal. Genre t'écartes les cuisses, tu ponds et tu te tais.

Dans les livres de AusBroTroll, c'est aussi très présent, je m'en suis rapidement aperçue, mais comme l'histoire d'amour finit souvent bien avec ces auteurs, je n'avais pas véritablement compris la gravité de la chose, je m'en rend compte maintenant. Et c'est ça qui m'indigne plus que les personnages, en réalité. C'est la réalité la plus cruelle que Hardy dépeint, il n'a clairement pas peur de le faire, il dit merde à l'obscurantisme. Je pensais qu'on avait atteint des sommets de crachats avec "La dame du manoir de Wildfell hall", bah je m'étais bien foirée ! Brontë est au plus haut de l'échelle pour ce qui est du "fuck !", mais Hardy est des kilomètres au-dessus d'elle.

On pourrait croire que rien ne m'a plu dans ce livre, mais en fait je l'ai adoré. Parce que des bouquins qui provoquent une telle réaction chez moi, c'est rare. Je vous jure que j'en hurlais parfois tellement j'en revenais pas ! Qu'un homme et une femme soient traités ainsi par la société simplement parce qu'ils refusent de voir les choses comme on leur dicte et de rentrer dans les rangs, sans rien faire cependant pour se relever hormis s'entêter à baisser la tête et partir, ça m'a foutue dans une telle rage ! C'est par cette cruauté et cette noirceur que l'histoire est belle, belle, belle.

Enfin, je dis ça mais j'ai pas encore lu la fin donc… Bah je vais lire les 100 pages qui me restent, et je reviens.

20 heures plus tard … (nan, j'ai pas mis des plombes à lire 100 pages, j'ai simplement dormi entre temps)

Une fin à la hauteur de tout ce que fut le livre : déprimante ! C'est dur, ça fait mal, ça m'a filé le bourdon, et pour être franche je suis contente d'avoir terminé. Je peux quand même pas m'empêcher de penser que je l'ai aimé. Je crois que j'aurais préféré ne pas l'aimer, tout le problème est là. Parce que comment on peut apprécier une histoire d'une telle noirceur ?!!

La façon d'agir de tous les personnages, sans exception, m'a fait gerber, je n'ai supporté aucun d'entre eux, et je crois que c'est ce que voulait l'auteur… enfin, j'espère. Parce que s'il avait dans l'idée de nous les rendre attachants, il a foiré. Ou alors il voulait juste qu'on ait pitié d'eux, et à ce moment-là, c'est réussi. Sauf pour Sue, que je hais du fond de mon âme maintenant que j'ai lu la fin. Sale peste, putain !!

J'en sais rien en fait. Je suis hors de moi.

D'autres avis sur
https://www.livraddict.com/biblio/livre/jude-l-obscur.html
 
Cette lecture clôt admirablement le challenge "Un mois, un auteur classique Britannique" que j'ai commencé il y a un an. Merci à Evy de l'avoir créé, j'ai découvert pas mal d'auteur, beaucoup de livres, et je suis passée par énormément d'émotions !

Si t'as rien d'autre à faire :
Exploratology est de retour !
Et un Hobbit, un !
Je vais commencer le tome 3.