En plus, à tous les coups ça va partir dans tous les sens, comme de coutume. J'ai prévu de faire un truc construit, mais à mon avis l'échafaudage va se casser sévèrement la gueule. Enfin, c'est pas comme si vous aviez pas l'habitude, hein ?
Éditeur : Archipoche
Parution : 2016
Pages : 568
Résumé :
Recueilli par une grand-tante qui le dédaigne et lui promet un destin funeste, Jude Fawley, orphelin, ne trouve de sympathie qu'auprès de son maître d'école. Mais celui-ci l'abandonne à son tour pour suivre ses études à Christminster…
Rêvant de l'imiter, le jeune homme apprend le latin et le grec en autodidacte, gagnant sa vie comme tailleur de pierre. Mais l'appel de la chair a raison de ses aspirations : il se résigne à épouser Arabella, une paysanne qui n'entend rien à sa soit d'instruction.
Condamné par son origine modeste, Jude l'est encore par les liens d'un mariage forcé, puis par l'interdit pesant sur son amour illicite avec Sue, sa propre cousine. Décrivant "la guerre terrible qui se livre entre la chair et l'esprit", Thomas Hardy s'en prend avec vigueur aux lois sur le mariage, qui retardent l'accomplissement du destin de Jude.
Sachez qu'au moment où j'écris, là, j'ai pas totalement fini le livre, il me reste un peu plus de 100 pages à lire, mais je pouvais pas attendre, fallait que je me lance maintenant. Je sais pas trop pourquoi, et on s'en fout.
Le contexte c'est celui de l'Angleterre rurale de la fin du XIXè, typiquement le genre que j'aime vous le savez sans doute maintenant. Mais les auteurs de cette époque que j'ai lu jusqu'à présent (à savoir Austen, les sœurs Brontë et Trollope) ne m'avaient absolument pas habituée à ça, mais genre absolument pas du tout non.
Ce livre est d'un pessimisme à chialer ! C'est horrible ! Avec AusBroTroll (hein ?! Alors là, si vous avez pigé, vous êtes balèze) il y a toujours une lueur d'espoir, quelque chose de bien arrive toujours aux personnages à un moment donné, et ça fait plaisir parce qu'on a l'impression de sortir la tête du trou. Pas là. Pas avec Hardy.
Du coup, ça m'a révoltée, ça m'a indignée à un point dingue ! J'en suis arrivée à me taper le front avec le livre en retenant un cri de colère (ça va pas m'arranger, je suis d'accord), et les principaux responsables des sévices que je me suis infligée, se sont les personnages. Parce qu'ils laissent glisser ces cons ! Ils encaissent, et quand ça devient trop dur à supporter, ils partent. Et ça me révolte parce que je suis plutôt du genre à rentrer dans le gras de ceux qui m'emmerdent.
OK, là je viens de jeter un coup d'œil à mon plan et je me rends compte que j'aurais dû commencer en vous parlant de l'auteur pour vous aider à mieux comprendre. Génial, c'est déjà le bordel.
L'auteur, donc : clairement féministe, défenseur de Darwin et passionné d'archéologie, ayant perdu la foi sans réussir totalement à en faire le deuil, il a pourtant connu, avec ses premiers livres, un joli succès à l'époque. Mais "Jude l'obscur" est tellement moderne et scandaleux pour les gentils hypocrites Victoriens qu'il est publiquement brûlé (le livre hein, pas l'auteur…) et vendu sous le manteau par les éditeurs/libraires qui ont assez de couilles pour le faire, enroulé dans du papier pour le cacher. Si si. Hardy provoque une telle polémique alors, et il en prend tellement dans la tronche, qu'il arrêtera totalement d'écrire des romans après ça, et se consacrera à la poésie, et au théâtre.
Quand j'ai su ça grâce à cette vidéo, je me suis dit qu'en fait c'est pas plus mal que j'ai pas vécu à cette époque. Là, je remercie pas AusBroTroll, à cause de qui je m'étais totalement voilé la face.
Bref, j'en reviens à ce que je disais avant cette parenthèse. À cause du titre, je m'attendais à un personnage sombre, torturé par l'ambition et son désir d'instruction que j'étais sûre d'apprécier parce que j'aime les gens mauvais. Sauf que c'est pas du tout ça. Jude est un personnage de l'ombre qui a un énorme désir d'apprendre, de s'élever et de s'extraire de sa condition, mais que le moindre coup met à terre et qui se résigne beaucoup trop facilement. De l'ambition, c'est clair qu'il en a, mais il ne se donne pas les moyens d'accomplir son rêve. D'accord, à l'époque tout est contre lui car l'instruction est littéralement refusée aux non-privilégiés qui doivent se contenter de rester à leur place, mais plutôt que de le rendre hargneux, cette réalité dégueulasse le laisse démoralisé, passif. Un gros, gros merde à ce personnage qui, s'il me plaisait au début, m'a tellement déçu au bout d'un moment que je suis limite contente de ce qui lui arrive. En sachant aussi que ça m'a énormément touchée. En fait, j'ai le cul entre deux chaises, là. Ce qui lui arrive est en parti à cause de l'ostracisme social de l'époque, et ça me révolte !
Sue, que j'ai d'abord pris pour un personnage résolument moderne, féministe et fort, n'a tellement pas conscience de l'être qu'elle finit par devenir juste terriblement égoïste après être passée par une phase de coquetterie terrible ! Avec ses "je t'aime moi non plus" à répétition, elle m'a très vite énervée. Mais là encore, je sais que cette évolution (régression, j'ai presque envie de dire) est due à l'époque dans laquelle elle évolue. J'ai le sentiment que Hardy a attaché moins d'importance à la façon dont serait perçue cette femme qu'aux raisons qui la rendent aussi insaisissables, c'est-à-dire les lois du mariage. Le personnage lui-même pose, dans le dernier tiers du livre, une question très pertinente : "pourquoi les femmes ne pourraient-elles pas choisir le père de leurs enfants ?" Putain, si ça c'est pas un gros pavé jeté dans la marre, je sais pas ce que c'est ! L'auteur critique très ouvertement le caractère sacré du mariage qui obligeaient les femmes, considérées à cette époque comme des êtres de seconde classe ne disposant même pas de leur corps et appartenant totalement à leur père, puis à leur mari, à obéir sans rien dire et à considérer cet état de fait comme totalement normal. Genre t'écartes les cuisses, tu ponds et tu te tais.
Dans les livres de AusBroTroll, c'est aussi très présent, je m'en suis rapidement aperçue, mais comme l'histoire d'amour finit souvent bien avec ces auteurs, je n'avais pas véritablement compris la gravité de la chose, je m'en rend compte maintenant. Et c'est ça qui m'indigne plus que les personnages, en réalité. C'est la réalité la plus cruelle que Hardy dépeint, il n'a clairement pas peur de le faire, il dit merde à l'obscurantisme. Je pensais qu'on avait atteint des sommets de crachats avec "La dame du manoir de Wildfell hall", bah je m'étais bien foirée ! Brontë est au plus haut de l'échelle pour ce qui est du "fuck !", mais Hardy est des kilomètres au-dessus d'elle.
On pourrait croire que rien ne m'a plu dans ce livre, mais en fait je l'ai adoré. Parce que des bouquins qui provoquent une telle réaction chez moi, c'est rare. Je vous jure que j'en hurlais parfois tellement j'en revenais pas ! Qu'un homme et une femme soient traités ainsi par la société simplement parce qu'ils refusent de voir les choses comme on leur dicte et de rentrer dans les rangs, sans rien faire cependant pour se relever hormis s'entêter à baisser la tête et partir, ça m'a foutue dans une telle rage ! C'est par cette cruauté et cette noirceur que l'histoire est belle, belle, belle.
Enfin, je dis ça mais j'ai pas encore lu la fin donc… Bah je vais lire les 100 pages qui me restent, et je reviens.
20 heures plus tard … (nan, j'ai pas mis des plombes à lire 100 pages, j'ai simplement dormi entre temps)
Une fin à la hauteur de tout ce que fut le livre : déprimante ! C'est dur, ça fait mal, ça m'a filé le bourdon, et pour être franche je suis contente d'avoir terminé. Je peux quand même pas m'empêcher de penser que je l'ai aimé. Je crois que j'aurais préféré ne pas l'aimer, tout le problème est là. Parce que comment on peut apprécier une histoire d'une telle noirceur ?!!
La façon d'agir de tous les personnages, sans exception, m'a fait gerber, je n'ai supporté aucun d'entre eux, et je crois que c'est ce que voulait l'auteur… enfin, j'espère. Parce que s'il avait dans l'idée de nous les rendre attachants, il a foiré. Ou alors il voulait juste qu'on ait pitié d'eux, et à ce moment-là, c'est réussi. Sauf pour Sue, que je hais du fond de mon âme maintenant que j'ai lu la fin. Sale peste, putain !!
J'en sais rien en fait. Je suis hors de moi.
D'autres avis sur
Si t'as rien d'autre à faire :
Exploratology est de retour !
Et un Hobbit, un !
Je vais commencer le tome 3.
J'étais à peu près dans le même état que toi pendant et après Tess d'Urberville ^^ Je ne suis pas sûre de pouvoir réitérer l'expérience avec ce livre-ci :lol:
RépondreSupprimerSinon: Austen, Bronte, Trollope?
J'ai "Tess" dans ma PAL, et "Loin de la foule déchaînée" aussi je crois, mais à mon avis je vais pas relire cet auteur avant un moment :P
SupprimerYep, bien vu ! Et vive AusBroTroll !!!!
Je ne sais pas pour Loin de la foule déchaînée, mais une pause avant d'attaquer Tess, ça me semble judicieux :lol:
SupprimerOui je pense aussi, je vais laisser passer un peu de temps XD
SupprimerEt c'est ainsi que Syl perdit le sommeil... XD
RépondreSupprimerSinon, plus sérieusement, je n'ai pas lu ce roman donc ça va être difficile de donner un avis sur quoi que ce soit mais peut-être que ta réaction vis-à-vis de ce livre prouve qu'il s'agit d'une réussite (et pour toi d'une bonne expérience). En fait, ce qui t'a le plus énervé on dirait, ce sont les personnages mais il ne faut pas oublié que c'est une oeuvre naturaliste (merci Google) et donc, quelque part, sociologique. Les personnages ne sont pas là pour être appréciés. Ils servent bien souvent à dénoncer la société dans laquelle il tente d'évoluer (ou de survivre, disons-le clairement). Dans le cas de ce roman, en tout cas si j'ai bien lu ta chronique, c'est exactement ça. Jude, malgré ses ambitions, est obligé de se "ranger", de rester dans la norme sociale s'il ne veut pas devenir un paria (et à cette époque plus qu'aujourd'hui, être en dehors de la société... niveau perspective d'avenir... voilà quoi).
Et puis, si le roman a réussi à te révolter contre la société qu'il dépeint, et bien ma foi, je pense qu'on peut dire que c'est une réussite parce que c'est très certainement le but recherché par l'auteur.
Bref, en gros, est-ce un bon roman ? Certainement. Je ne peux pas être catégorique mais vu ce que tu en dis, ça correspond parfaitement à la définition du roman naturaliste.
Voilà, j'espère que tu pourras dormir. XD
Merci XD Je vais sans doute pouvoir faire dodo ! Quant à faire de beaux rêves, j'pense pas, mais c'est déjà un pas en avant !
SupprimerC'est totalement ce que j'ai tenté d'expliquer, t'as parfaitement bien résumé. L'auteur ne pense qu'à la critique alors il n'hésite pas à faire souffrir ses personnages et à nous les rendre limite détestable, les autres auteurs (AusBroTroll :P) font ça aussi, mais ils essayent toujours, à côte de ça, de démontrer que malgré tout on peut s'arranger de tout ça et vivre heureux. pas Hardy.
Et c'est complètement en ça que l'œuvre est une réussite, comme tu dis ;)
Peut-être qu'AusBroTroll cherche à rendre la lecture agréable (en tout cas, moins brutale) en faisant ce genre d'ouverture heureuse à la fin de leurs romans. Ce que Hardy ne fait vraisemblablement pas parce qu'il doit être plus direct et n'aime pas enjoliver et atténuer contrairement à certains de ces contemporains (c'est peut-être aussi simplement parce qu'il est pessimiste, va savoir).
SupprimerSinon, c'est marrant, mais je viens juste de trouver une référence à ce roman dans un Stephen King (Dead Zone). Sacrée coïncidence, non ? :p
Oui je pense que c'est totalement ça, Hardy n'a simplement pas envie de nous faire croire que tout fini bien alors que c'est (rarement) le cas, surtout à cette époque :P
SupprimerÇa, si c'est pas un signe, je sais pas ce que c'est XD
Je n'ai pas lu ce livre mais j'ai Loin de la foule déchaînée dans ma PAL (que j'ai hâte de lire mais pas du tout le temps en ce moment). Quand je lis ta réaction, je pense que Hardy, avec toi, a fait BINGO!!! Ça dérange et c'est ce qui est bon. J'en conclue que l'on ne sort pas idem d'une telle lecture mais je sens qu'elle t'a tellement marquée que tu n'est pas prête de l'oublier. L'auteur a bien fait son job;) En tout cas, avec ta chronique, je suis encore plus impatiente de découvrir l'oeuvre de Hardy, merci ! :)
RépondreSupprimerFranchement c'est totalement ça, ça m'a marquée, c'est fou ! J'arrive pas à me sortir l'histoire de la tête, un truc de dingue. Et c'est effectivement en ça que l'auteur est très bon :D
SupprimerCoucou Gaby !
RépondreSupprimerJ'adore les livres qui provoquent autant de passion chez les lecteurs … et en même temps, je les déteste !!
J'ai eu exactement la même réaction que toi en lisant Le Cousin Pons de Balzac ! Ce type est comme Jude : il se laisse marcher dessus et ne réagit pas ! Les autres personnages sont tous détestables : ils représentent bien la pire facette de l'humanité. Quelle déprime, et quelle tristesse …
Je n'ai pas encore lu Thomas Hardy, mais j'en ai très envie ! (j'ai vu le mot "féministe", ça y est, j'achète ! Surtout à l'époque victorienne !) J'ai Loin de la foule déchaînée ; tu l'as lu ?
Sinon, j'ai enfin lu le premier tome de Library Wars ! C'était top !! :D
Je te fais plein de bisous ma Gaby !! :*
Hey !
SupprimerPareil, j'adore et je déteste en même temps. Je suis toujours autant révoltée par cette lecture, et d'un autre côté je sais que je l'oublierai jamais :D
J'ai "Loin de la foule déchaînée" dans ma PAL, mais je vais certainement attendre un peu avant de relire cet auteur :P
J'ai vu pour Library Wars, je suis contente que ce premier tome t'ait plu !
Plein de bisous à toi aussi XD