25/05/2019

10 ans plus tard.

En vrai ce bouquin je l'ai fini en janvier je crois bien, mais j'étais tellement vénère qu'en le refermant j'ai préféré l'oublier et oublier cette chronique. Oublier aussi que j'avais adoré cette série au-delà du possible il y a quelques années.

Je suis sûre que vous voyez de quoi je parle !

Editeur : Folio
Parution : 2008
Pages : 748

Résumé :
Seize ans ont passé… Takeo et Kaede font régner sur les Trois Pays la paix et la prospérité. Leur fille aîné, la belle Shigeko, promet d’être une héritière digne d’eux. Mais cette harmonie est en danger. Certains membres de la Tribu n’ont pas renoncé à leur vengeance, des guerriers forts de l’appui de l’empereur convoitent le pouvoir, les étrangers arrivent avec leur religion et leurs armes à feu et le fils caché de Takeo, que la prophétie désigne comme artisan de sa mort, a grandi. Les ressorts de la tragédie sont en place…



Ce genre de déception est bien plus difficile à digérer que quand vous êtes simplement déçue par un livre que vous découvrez. Relire quelque chose que vous avez aimez et ne pas/plus comprendre pourquoi vous l'avez tant aimé, c'est déroutant et énervant. Là, je ne sais pas contre qui je dois m'énerver. Moi, ou l'auteure ? Qu'est-ce qui a bien pu m'arriver dans ma vie pour que je déteste à ce point "Le clan des Otori" ?

C'est vrai qu'en 10 ans j'en ai vécu des situations difficiles, mais il suffit de peu de choses pour vous transformer. Oui parce que relire des livres, ça a une signification hautement plus importante que simplement le "pour se faire plaisir". C'est aussi une façon de découvrir votre propre évolution psychologique et vous amener à vous interroger sur vous-même. Pendant ma lecture, je n'arrêtais pas de repasser dans ma tête ces quelques années qui se sont écoulées depuis ma découverte de cette série. Je suis revenue sur pas mal de choses et j'ai réalisé que oui, effectivement, j'avais énormément changé, et que parfois (presque toujours, d'ailleurs) vos goûts et vos préférences ne suivent pas ce changement. Fort heureusement, d'autres les remplacent, et les passions les plus fortes vous suivent plus longtemps. Je suis persuadée, tout au fond de mon petit cœur noir tout sec, que certaines m'accompagneront toute ma vie.

Mais pas "Le clan des Otori". Tout comme "Eragon" a fini par me quitter, lui aussi.

Attention, je vais parler de ce livre avec beaucoup d'acidité. L'histoire traîne en longueur, il ne se passe rien d'autre que des introspections ennuyeuses qui n'aboutissent à rien, même pas à une fin digne de ce nom. Un peu d'action aurait pu sauver tout ça, mais l'auteure n'a pas su doser et le peu de choses susceptibles de réveiller un tant soit peu mon intérêt ne durait que le temps d'un pet. Nan mais sans déconner, préparer une bataille importante pendant 10 plombes et la boucler en deux paragraphes, c'est pas du foutage de gueule ça ? Tout comme la trilogie de base, la fin est très, très mauvaise ! Je ne parle pas de l'événement ou de la situation, car j'ai aimé ce qu'il se passe, ce qui m'a énervée au-delà du possible, c'est la façon dont ça se passe. Autrement dit : l'auteure ne sait absolument pas raconter les choses. Comme historienne, je suis sûre qu'elle doit être très bonne, mais comme conteuse d'histoire, c'est autre chose.

Les personnages de Kaede et Takeo étaient là aussi ultra agaçant. Kaede plus que jamais. Au début, je trouvais que leurs enfants relevaient un peu le niveau, notamment les jumelles qui ont des personnalités très intéressantes, mais soit leur évolution ne m'a absolument pas plu, soit elles n'évoluent carrément pas. Et les autres personnages qui gravitent autour de cette famille ne sont tellement pas mis en avant que j'ai oublié à la fois leur nom et leur utilité dans l'histoire.

Je ne dis pas que tout est bon à jeter dans ce livre. Pour ceux qui le découvrent, c'est de la bonne aventure saupoudrée d'historique et de fantastique. Mais pour moi, qui redécouvre un quasi coup de cœur d'adolescente ? Bah c'est de la merde.

Et vous savez quoi ? Le pire c'est que le relis quand même le tome 5. Je suis dingue ou quoi ?

02/05/2019

8 ans que ça dure.


Cette chronique sera un peu différente de ce que je fais habituellement. Je ne vais pas parler d’un seul livre en particulier, mais d’une série entière. Que dis-je, de tout une saga ! Non pas pour vous décortiquer chaque tome et vous balancer du spoil dans la gueule en veux-tu en voilà, rassurez-vous, mais uniquement pour vous présenter l’univers génialissime créé par nul autre que Robin Hobb. Je veux bien sûr parler du cycle de l’Assassin Royal.

Je vous prie de croire que descendre tous ces bouquins de ma bibliothèque jusque dans les escaliers, c’était bien casse-couilles !

Je l’ai découvert il y a 8 ans, lorsqu’une amie m’a prêté le tout premier tome : « L’apprenti assassin ». Je ne savais absolument pas dans quoi je foutais les pieds, ni même que cette passion allait m’accompagner un bon bout de temps, au gré de mes déménagements et de mes galères. Enormément de livres sont passés à la trappe depuis, des livres que je pensais garder et dont je me suis finalement séparée parce que je ressentais plus rien pour eux, certains que j’ai relu et bien moins aimés puis que j’ai donné, et d’autres que j’ai revendu parce que j’avais besoin d’oseille (oui parfois tout n’est qu’une question de pognon !) mais pas l’Assassin Royal. Cette série a subi pas moins de 7 changements de domicile, plusieurs invasions de mouche à caca, une tentative vite avortée de mon petit frère de s’essayer à la lecture, de la bave de chien, l’humidité, la poussière et le temps qui passe. La plupart des tomes sont cloqués de taches jaunes, surtout les 6 premiers et tous ceux des « Aventuriers de la mer », et sentent le vieux parchemin qui donne faim (si si, je vous jure)

Une saga qui s’apprivoise
Je me souviens parfaitement du moment et de l’endroit où je me trouvais quand j’ai lu le tout premier tome ; et surtout, je me souviens de ce que j’ai ressenti. Honnêtement, je me suis simplement dit que j’avais trouvé là une bonne distraction, une lecture efficace et agréable comme je les aime qui, manifestement, puisque je savais de combien de livres était constituée la série, serait avec moi quelques mois. Ça n’a pas été un coup de cœur immédiat. Je passais simplement un bon moment, au début, avec une narration que je n’avais jamais vu en fantasy et des personnages parfaits, avec juste ce qu’il faut de commun dans le genre pour qu’on soit pas trop dépaysé. C’est quand j’ai compris, petit à petit, que tout un vaste monde riche, bien loin d’avoir tout dévoilé, était en train de s’ouvrir sous mes yeux et que j’en percevais à peine les premières toiles, que j’ai été happée.
Avec Robin Hobb, on apprend la patience. La dernière série en date de ce cycle : « Le fou et l’Assassin », se termine tout juste et j’ai la sensation qu’on a à peine entrevu ce que l’auteure voulait nous raconter. Pourtant, 5 séries composent cette saga, avec chacune 6 à 9 tomes (oui, elle voit grand) mais ça se dévoile lentement, ça s’échappe et nous montre l’infini d’un monde vaste. Parfois, j’avais l’impression d’en saisir une partie, d’en connaître enfin un morceau, une part de son histoire, ou ne serait-ce qu’un bourg, une colline ou une vallée, et puis tout s’échappait et se remodelait de lui-même par un souvenir, l’arrivée d’un nouveau personnage ou bien un petit détail qui me sautait aux yeux et m’obligeait à tout remettre en question.
Si je n’avais qu’une seule chose à reprocher à toute cette fresque romanesque, ce serait son rythme. Hormis la lenteur de l’évolution de l’intrigue et des révélations qui jalonne le récit, je trouvais que ça manquait parfois cruellement d’action. Il y en a, évidemment, au fil des livres, car les personnages ont des missions à accomplir et des batailles à mener, mais assez souvent les développements sont tout en finesse, en dialogues et en réflexion. L’auteure n’essaye même pas de nous faire croire que c’est accidentel ; elle nous livre un récit d’une complexité étonnante en nous mettant l’eau à la bouche par ses rares bribes d’information et elle le fait clairement exprès. C’est comme si, tout en nous offrant tout ça, elle nous retenait en arrière, par la main, en nous disant : « Nan nan, pas tout de suite »

Des protagonistes qui se livrent
Mais avant d’être des épopées, ces histoires sont des personnages. Pas moins d’une dizaine de mecs et de nanas par séries interagissent et évoluent dans certaines situations qui, aussi étonnant que ça paraisse, ne sont jamais les mêmes. Malgré certaines lignes scénaristiques qui se regroupent, car tout ça suit un fil principal, l’auteure ne nous raconte jamais la même chose. Bah il en va de même pour les personnages. Evidemment, certains traits de caractère se ressemblent (et je soupçonne, pour quelques-uns, que ce soit fait exprès) mais tous sont bien définis, reconnaissables. Parfois attachants, parfois haïssables, certains m’ont tout de suite touchée et d’autres ne m’ont plu qu’après un peu de temps grâce à une évolution sensible.
Entre Brodette, Kettricken, Œil-de-Nuit, Burrich, Altéa, Malta, Parangon, Kalo, Carson, Alise, Persévérance et bien d’autres, j’ignore lequel je suis le plus triste de quitter !
Le travail psychologique et émotionnel que Robin Hobb accomplit avec eux est d’autant plus incroyable que près de soixante années (si je dis pas de conneries) s’écoulent entre le tout premier tome et le tout dernier. Ces personnages changent donc et évoluent constamment en fonction de la série et l’époque dans laquelle on les retrouve (car oui, les crossovers sont nombreux et certains principaux d’un arc peuvent apparaître en tant que secondaires dans un autre à des années d’intervalle !!) En fait, en tant que spectateurs, on les observe traverser la vie et c’est incroyablement touchant la plupart du temps, ça fout une boule au ventre par moment quand on se rappelle par exemple comment étaient certains d’entre eux bien des années plus tôt. Parfois, j’avais juste l’impression de retrouver de vieilles connaissances, et je me sentais tout de suite à l’aise dans une nouvelle série quand d’anciens personnages apparaissaient, même succinctement, ce qui permet de prendre tout de suite pied.
L’auteure réussit l’exploit de toujours nous faire aimer de nouveaux protagonistes malgré la nostalgie et la tristesse qu’on a ressenti en quittant les précédents. Personnellement, je n’ai jamais eu aucun mal à commencer une toute nouvelle aventure parce que je savais qu’elle avait le talent suffisant pour me faire adorer de nouveaux personnages, car le travail qu’elle accomplit me convient parfaitement. Je suis très sensible à l’attachement quand je lis, certains personnages deviennent vraiment des amis, alors je suis totalement et toujours ouverte à ce que Hobb propose. En gros, je suis à 100% le genre de lecteur qui convient à son style quoi.

Un monde qui s’étend toujours plus
Dans la majorité des livres/séries fantasy que je connais et que j’apprécie, les frontières sont clairement définis dès le départ (je pense notamment à « Druides » de Olivier Peru ou encore « Les Royaumes de Tobin » de Lynn Flewelling qui sont de superbes bouquins) et je pensais que c’était la même chose quand j’ai commencé l’Assassin Royal. Mais Robin Hobb a plus d’un tour dans son sac et tout comme elle aime prendre son temps avec l’intrigue, elle aime aussi dévoiler ses créations par petites touches. Si j’ai très vite compris que ses livres cachaient beaucoup de choses et surtout un monde incroyablement riche et vaste, ça s’est cependant dévoilé lentement. Chacune des séries se passe dans un coin particulier d’une carte gigantesque et tout fini par avoir un lien malgré les distances géographiques parfois astronomiques. Seulement, encore une fois, il faut savoir faire preuve de patience.
Tout le cycle semble être arrivé à son terme et je n’ai compris qu’à la toute fin comment chacun des pays et des royaumes étaient liés (je soupçonne même un lien avec l’endroit où se passe « Le soldat chamane », l’une de ses seules séries qui ne serait pas, à première vue, liée à « L’Assassin Royal ») mais je saurais pas expliquer comment…
En réalité, des choses restent en suspens. En tout cas, c’est mon ressenti. Du coup, j’ose espérer, mais peut-être que c’est uniquement dû au fait que je ne veux pas que ce soit terminé !!, que l’auteure va continuer sur sa lancée.
Elle en a fait énormément, ça fait des années que ça dure, mais tout est si étendu et complexe que je suis certaine qu’elle pourrait continuer comme ça un moment. Entendons-nous bien, je suis la première à déclamer souvent rapidement et toujours haut et fort que certaines séries vont trop loin, en livre comme à la télé, et qu’auteurs et/ou réalisateurs devraient arrêter de tirer sur la corde et d’en faire trop (je pense au « Trône de Fer », notamment) Quand certaines s’arrêtent en pleine gloire, je suis plutôt contente, surtout si je pressentais un dérapage en cours de route si ça stoppait pas. Alors que j’en redemande pour ce cycle, ça veut sans doute dire quelque chose.

Une auteure qui n’a pas froid aux yeux
Pratiquement inexistantes au début, l’homosexualité et la bisexualité s’invitent ensuite dans la saga avec un naturel qui m’a d’abord désarmée. L’originalité de ses personnages et la multiplicité des différentes personnalités s’expliquent sans doute un peu grâce à ce sujet que Robin Hobb n’a pas hésité à aborder.
Certains protagonistes sont à l’aise avec leur sexualité depuis des années, d’autres la découvrent seulement, et c’est traité sans prise de position, sans interdit et sans peur.
Elle n’hésite pas non plus à pimenter quelque peu ses récits par des scènes légèrement érotiques, bourrées de charme et d’amour, et d’autres plus violentes qui m’ont parfois fait grincer des dents malgré la nécessité de leur présence. Elle évoque  et dénonce des sujets sensibles comme le viol, l’esclavage, la dépression, l’abandon, la maltraitance infantile, la fugue, et beaucoup d’autre qui donne à ses histoires une profondeur tragique.
J’aime particulièrement quand elle traite, avec beaucoup de sensibilité, du rapport de l’être humain avec l’Histoire en général, et le passé. Certains n’accordent absolument aucune importance aux monuments et civilisations historiques et dans un élan parfaitement égoïste sous couvert de tout raser pour mieux renaître, détruisent et saccagent sans pitié. L’auteure nous sensibilise, à travers ses textes, à l’importance de la sauvegarde de notre patrimoine et de la conservation des souvenirs et des actes historiques sous toute leur forme. Oui, la guerre est quelque chose de terribles, les génocides aussi (et il y en a, dans ses livres) mais aussi horribles qu’ils soient, on ne doit pas pour autant les oublier, au risque de commettre les mêmes erreurs.
Je pense qu’elle et moi portons un même regard sur ce sujet, et c’est sans doute pour ça que ce cycle m’a totalement envoûtée. Et c’est particulièrement présent et poignant dans « Le soldat chamane ».

C’est assez casse-gueule, à bien y regarder, d’écrire une telle chronique. C’est vraiment un tel coup de cœur énorme que j’ai l’impression de ne pas être objective. J’ai tenté de parler des plus et des moins, mais étant donné que je suis ultra fan du concept, du style et de tout ce qui va avec, bah j’ai l’impression de manquer de discernement.