23/06/2018

Conflits sociaux et lutte ouvrière. C'est ce qui s'appelle foutre un gros coup de pied dans la fourmilière.

Nouvelle lecture dans le cadre du challenge "Un mois, un auteur classique britannique" créé par Evy ! Et il a frôlé de près le coup de cœur.

Éditeur : Points
Parution : 2010
Pages : 673

Résumé :
Après une enfance passée dans un village riant du Hampshire, Margaret Hale, fille de pasteur, s'installe dans une ville du Nord. Témoin de luttes entre ouvriers et patrons, sa conscience sociale s'éveille. John Thornton, propriétaire d'une filature, incarne tout ce qu'elle déteste : l'industrie, l'argent et l'ambition. Malgré une hostilité affichée, John tombera sous son charme.





De base, ce genre d'histoire me plaît pas mal, le soucis c'est que j'ai eu du mal avec Margaret. Au début, je l'ai trouvé vachement horripilante, hautaine, butée et passive en même temps. Elle laisse pratiquement tout le monde décidé pour elle et s'arme juste de courage et de patience pour tout supporter en râlant dans son coin. On est un peu loin de la femme téméraire qui n'hésite pas à dire les choses, à l'instar de la Lizzy de Jane Austen.

Heureusement, elle change lorsqu'elle rencontre Thornton. Cet homme éveille en elle une combativité qu'elle s'efforçait jusqu'ici de garder sous contrôle et elle va commencer à l'ouvrir, à se sentir impliquée et à se battre davantage pour défendre ses idées et son point de vue. Là, elle m'a plu un peu plus. Mais juste un peu. Parce qu'elle continuera finalement de se laisser balloter… Bon, je suis un peu méchante, c'est un très bon personnage vu le contexte du roman, malheureusement pour elle des héroïnes de cette trempe il en existe des bien meilleures créées par des auteurs de la même époque. Je pense notamment à Mary, dans "Le docteur Thorne" de Trollope, avec qui j'ai eu un peu de mal aussi, mais qui me paraît maintenant vachement plus chouette.

La romance est ici construite à peu près comme dans "Orgueil et Préjugés" : Margaret se fait rapidement des préjugés hostiles pour les plus fortunés de la ville de Milton, prend Thornton en grippe, n'hésite pas à lui faire comprendre qu'elle n'est absolument pas d'accord avec sa façon de traiter ses ouvriers ou de voir les choses, et l'envoie péter sans arrêt. Et comme de juste, il se met à craquer pour elle, et petit à petit…

Mais j'en dis pas plus.

L'ennui c'est que le potentielle de cette histoire d'amour est cachée derrière la dure réalité sociale que l'auteure a voulu dénoncer, à savoir les conditions de travail des ouvriers dans les grosses villes industrielles. Elle s'est concentrée là-dessus au point d'en effacer le reste et malgré que ce soit vachement intéressant j'ai trouvé ça un peu dommage (c'est mal dosé pour moi en gros). Elle a l'air de savoir de quoi elle cause et j'ai pas pu m'empêcher de penser qu'elle avait manifestement pris le parti de considérer les patrons comme les méchants et les ouvriers comme les victimes. Elle avait fait son choix, quoi. Ce qu'il y a de bien, c'est qu'elle dénonce tout de même les qualités et les travers de chacun, ce qui permet au lecteur de faire ses propres choix. Je ne doute pas que ce livre, à sa sortie au XIXème siècle, a dû remuer pas mal la bonne société.

Sans compter qu'il y a dans ce texte une intensité dramatique que je n'avais pas vu jusqu'ici dans les classiques anglais que j'ai pu lire (d'un autre côté, j'en ai lu moins qu'il n'y paraît). Il y a de la tragédie, des morts, et ce qui fini par arriver à Margaret m'a tout de même touchée malgré la difficulté que j'ai eu pour m'attacher à elle.

Je vais parler un peu du personnage de John Thornton maintenant. Parce que lui, je l'ai vraiment adoré ! Il rejoint sans hésitation le petit groupe de gars qui sont parmi mes chouchous dans la littérature (j'en présente quelques-uns dans ce TAG que j'ai publié à la Saint-Valentin) Contrairement à son homologue féminin dans cette histoire, c'est quelqu'un qui se remet en question, qui évolue beaucoup au fil des événements, qui garde un sang-froid absolu face à ce qui lui tombe dessus, et ne baisse jamais les bras. J'ai adoré son caractère malgré l'impulsivité un peu violente dont il fait preuve parfois.

Ce qui me fait finalement dire que ce n'est pas un coup de cœur, c'est la fin. Une grosse facilité vient clôturer cette histoire, un choix est fait pour terminer tout ça et je suis déçue car je trouve ça trop facile, ça contraste trop avec les drames et la dureté utilisés tout le long du texte. Ouais, en fait j'aurais aimé que ça se termine autrement, très clairement. 
Mais ça reste malgré tout une très bonne lecture car elle m'a fait découvrir autre chose. Gaskell dénonce, prend ses responsabilités, et même si elle a préféré rester prudente à la fin, j'ai apprécié ça.
 
D'autres avis sur
https://www.livraddict.com/biblio/livre/nord-et-sud.html
 
Allez, maintenant je m'en vais regarder l'adaptation de la BBC.

Au fait, nouveau tirage BookJar ! Mais comme j'ai la flemme de prendre une photo, je vais me contenter de vous annoncer que prochainement, je vais lire "Le peuple des Rennes" de Megan Lindholm, alias Robin Hobb.
 
Si t'as pas mieux à faire :
Un nouveau drama coup de cœur !
Je viens de commencer le tome 2.
Et celui-là.

22/06/2018

Et cette première tentative est un franc succès, nom d'une pine !

Ouais, c'est le quatorzième que je regarde. Et ouais c'est pas longtemps après Chicago Typewriter… et OUAIS j'ai pas chroniqué de livre entre temps, mais ça veut pas dire que j'ai pas lu ! (j'ai vraiment l'air de quelqu'un qu'assume pas et qui tente de se justifier, hein ?) D'ailleurs je vais pas tarder à baver sur un Elizabeth Gaskell, mais en attendant je vais bien vous tartiner avec ce nouveau coup de cœur :



Si je dis pas de conneries, c'est le premier du genre science-fiction que je regarde, et je ne sais pas pourquoi j'ai été tentée alors que je suis plutôt dans un trip fantastique en ce moment… ni même pourquoi je me suis pas tournée vers du polar pur et dur (il y a un peu de thriller dans celui-là quand même). Ah mais si, je sais ! En fait juste avant j'ai regardé Defendant, et c'était très dur. J'en parle dans le fourre-tout si le cœur vous en dit.

Bon et Circle alors, ça cause de quoi ? Pour le bien de mon article et pour vous faire bisquer, je vais volontairement écrire un résumé de mon cru qui en dira peu, libre à vous ensuite de chercher ailleurs quelque chose de plus complet, mais un brin plus spoilant. Puisqu'on en parle : ce que je reproche parfois aux synopsis des dramas, c'est d'en dévoiler un peu trop, ça plante efficacement le décors et le contexte et tout ce que vous voulez, mais en même temps ça gâche quelques petites surprises qui auraient pu être bien frappantes. OK, j'arrête et je vous balance ça :

2017. Woo Jin est un jeune homme relativement discret et solitaire, avec un bon esprit scientifique. Lorsqu'il apprend les circonstances du suicide d'un étudiant de son campus, le troisième en peu de temps, il commence à croire que son frère jumeaux, Bum Gyun, psychologiquement instable depuis le départ de leur père et tout juste sorti de prison, n'est pas étranger à cette tragédie. Mais lorsque ce dernier disparaît à son tour, il comprend que c'est bien plus grave et va se lancer à la recherche de son frère, qui tenait des propos étranges et très incohérents avant de se volatiliser.
2037. L'humanité est en danger à cause du taux de plus en plus élevé de particules fines dans l'atmosphère. Terre Intelligente est une ville à part, protégée, où règne une paix totale. Toute personne y pénétrant se voit implanter une puce Soin Stable qui stabilise les émotions intenses, créée par l'organisme Humain B. Cette immense ville se targue donc de ne connaître ni crime ni violence. Jusqu'à ce que le flic Kim Jun Hyeok, genre tête brûlée, reçoive un appel d'une jeune femme en détresse déclarant avoir été kidnappée sur Terre Intelligente. Son supérieur, Jin Hong, reconnait le nom de la victime et charge Jun Hyeok de résoudre ce mystère, ainsi qu'un autre, non élucidé : la disparition de jumeaux lors de suicides étranges dans un campus, vingt ans plus tôt…

Gardez bien à l'esprit que les résumés que je trouvais sur certains sites ne ressemblaient pas du tout à ça et en dévoilaient un peu trop de mon point de vue. En fait, si j'ai commencé à regarder ce drama c'est pour cet acteur, découvert dans "Goodbye Mr Black" dont je parle également dans le fourre-tout :

Kim Kang Woo joue Kim Jun Hyeok, ce détective un peu dingue qui a facilement recourt à la violence (généralement il tape avant de réfléchir, d'ailleurs) Mais sous ces airs cool de fou de la gâchette, il cache une fragilité et un secret stupéfiant. C'est sans aucun doute le personnage qui m'a le plus retournée, quand tout ce découvre petit à petit j'étais chaque fois estomaquée. Il paraît borné parfois, insensible, mais possède un courage et une volonté sans failles. Bref, le genre d'anti-héros qu'on voit souvent, pas très original en soi dans sa construction.
Heureusement l'acteur a su lui donner une authenticité stupéfiante avec un jeu très sensible et varié, allant de la loufoquerie la plus pure aux larmes les plus intenses. Sans compter qu'il n'est pas dégueulasse dans les chorégraphies de combat (je regrette carrément qu'il n'y en ait pas plus) alors pour moi c'était tout bon ! Réjouis-toi mon gars, je t'annonce fièrement que tu fais maintenant partie de mes préférés… bordel, va falloir que je revoie toute ma liste !


Cette jeune dame est Han Jeong Yeon, interprétée par Gong Seung Yeon. Clairement, c'est pour moi la meilleure actrice que j'ai vu jusqu'ici, détrônant Park Min Young (découverte dans Healer) Pourquoi ? Pas de minauderies, pas de bouderies, seulement quelques larmes de circonstances. Elle donne à son personnage, assez creux au début, une force que j'ai adoré, elle en fait une téméraire, une combattante, en lui laissant une sensibilité touchante, et tout ça sans en rajouter avec les expressions que toutes les actrices se collent à la tronche en Corée chaque fois qu'elles veulent obtenir quelque chose (la championne pour ça c'est Park Bo Young que je vous présente ) Cette jeune femme rencontre Kim Woo Jin en cours où ils se retrouvent à travailler en binôme et découvrent qu'ils enquêtent tous les deux sur les suicides mystérieux du campus. Au départ, je pensais que ce personnage n'était là que pour la romance, ou encore pour dynamiser les recherches pour retrouver Bum Gyun. Mais pas du tout ! Un gros mystère l'entoure et elle prend énormément d'importance au fil des épisodes, des révélations me laissaient là aussi totalement sur le cul.

J'en arrive forcément à Yeo Jin Gu qui campe Kim Woo Jin, le personnage principal de l'intrigue se déroulant en 2017. Je dois avouer qu'il m'a moins plu. Il n'évolue pas à mes yeux, ou peu, et celui qu'il est ne m'a pas séduite. Pourtant, il n'est ni irritant, ni ennuyeux… en fait, il n'a pas énormément de défauts mis à part un léger entêtement commun à tous les héros. C'est là que j'en viens à oser dire : c'est l'archétype du héros dévoué, courageux, sensible et ce genre de figure je m'en lasse généralement très vite (alors que le bagarreur-blagueur, non)
Le soucis c'est que l'acteur lui-même ne m'a pas convaincue. Il varie très peu ses expressions et celle de la surprise mêlée de tristesse qu'il arbore toujours a fini par me faire soupirer. C'est pas qu'il est mauvais, au contraire je pense, mais il a fait ce qu'on attendait de ce genre de personnage sans rien lui donner d'unique, contrairement aux deux précédents, et c'est bien dommage. Il reste tout de même sympathique !

Comme dans tous les autres dramas qui sont mes préférés, il y a dans Circle des personnages secondaires succulents que j'ai grave aimé ! Pour Kim Bum Gyun, le jumeau de Woo Jin, je dirai même que je l'ai largement préféré à son frère.
Il est interprété par Ann Woo Yeon que j'ai vu dans "Strong Woman Do Bong Soon" dont je parle dans le fourre-tout, sauf que je m'en souvenais absolument pas ! Il a fallu que ma curiosité pour ce jeune homme me pousse à chercher sa filmographie pour que je me rende compte que je le connaissais. Si j'en garde pratiquement aucun souvenir, c'est parce que son personnage de jeune médecin dans Strong Woman m'avait ennuyé (trop gentil, trop doux, trop dévoué, vous me connaissez, blabla) mais là, ce garçon perturbé, perdu, obsédé par un mystère, qui a fait de la prison… j'ai craqué pour lui. Sans compter qu'il a une bouille adorable qui colle pas du tout avec son petit côté dangereux. L'acteur s'est vachement investi émotionnellement, il était troublant, il m'a beaucoup touchée. Je vais le suivre d'un peu plus près, lui aussi.

Le second, c'est Lee Gi Kwang qui incarne So Hee. Au début, je le trouvais inintéressant, mais son histoire personnelle et son implication dans l'enquête aux côtés de Jun Hyeok ont pris de l'ampleur jusqu'à titiller mon indécrottable curiosité. L'acteur en lui-même était malheureusement assez fade pour moi et les quelques moments forts qu'il a eu me laissait un peu froide. Le dernier c'est l'inspecteur Jin Hong, joué par Seo Hyeon Cheol. Là, c'est totalement le genre de personnage décalé, un peu loufoque, qui me plaît (il me faisait pas mal penser à Gong Ju dans Angry Mom) et sa présence rassurante dans certains moments était indispensable.

Clairement, malgré ces supers acteurs et ces personnages extras, ce qui m'a le plus plu, c'est le scénario. Il est fluide, précis, et monté à la perfection ! La construction est assez unique, au point que j'étais un peu perdue au début, je trouvais ça même brouillon, puis une fois que j'ai compris comment c'était foutu, et la raison pour laquelle c'est construit de cette façon, j'ai pris une grosse claque. Tout est fait pour nous promener, mais c'est surtout l'alternance de ces deux époques principales qui nous mènent en bateau, car la première moitié se déroule en 2017 et la seconde en 2037. Nous avons donc à chaque fois 2 fins à suspens qui nous laissent songeurs, à chaque épisode de nouveaux indices viennent nous tromper et nous forcent presque à échafauder de nouvelles théories (qui seront littéralement démontées dans l'épisode suivant…)

Ce trailer pas trop spoilant (faites gaffe quand même) vous montre comment c'est monté :


J'y ai même pas trouvé une seule petite faille, putain ! Le seul truc que je lui reproche c'est peut-être d'aller un peu vite à la fin sur un sujet que j'aurais adoré voir développé davantage.

C'est sans doute la seconde force de ce truc : il nous aiguillonne dans certaines directions en nous forçant à réfléchir, notamment sur certains sujets éthiques, sociaux et moraux. Comme l'avancée scientifique par exemple. Doit-elle justifiée le sacrifice de vies humaines ? Ou encore l'importance des souvenirs : ne vaut-il pas mieux tout simplement oublier les mauvais, au point d'en effacer les responsabilités qui en découlent ? De fait, nos souvenirs nous définissent-ils ?

Vous avez 4 heures.

Je sais que tous ces sujets ont déjà été exploités en SF, que ce soit dans des films ou des séries, mais la façon dont Circle amène les choses et se démerdent pour nous bluffer est tout simplement magistral. Parce que si les personnages nous apportent des éléments de réponse à travers leurs regards sur les choses, finalement rien de clair ne nous est imposé. Il n'y a pas de bonne réponses à ses questions, et nous devons nous forger notre propre opinion… ou alors rester tout simplement songeurs. De fait, ça laisse certaines choses en suspension, quelques détails minimes nous restent mystérieux, inexpliqués, même à la fin. Et moi j'adore.

Un gros merci aux réalisateurs qui ont fait ça à la perfection, c'est cadré au millimètre et pourtant pas un seul instant on a la sensation que tout est strictement dosé. C'est pourtant le cas.

Sauf pour les émotions peut-être ! Il y en a beaucoup, bien plus que l'humour, c'est beau et terrible à la fois, ça remue les tripes, ça comprime le cœur, et à chaque épisode.

Un lien indéfectible entre ces deux frères malgré le temps qui passe
Bref, une petite pépite de SF qui s'ignore et qui en plus a osé quelque chose que je n'avais jamais vu dans un drama. Je sais que d'autres l'ont fait avant lui, mais c'est la première fois que je le vois. On est dans la tragédie et dans l'espoir, dans la réussite et l'échec, dans le dévouement et l'éloignement… putain, il y a tellement de choses.

Sans parler des OST parfaits ! Personnellement, j'ai une petite préférence pour ce qui semble être le générique de fin :


Vous voulez vous remettre en question ? Vous voulez trembler, vous inquiéter, sourire, rester béat ? Regardez Circle, et dites-moi si c'est pas une belle réussite

Update : revu en mai 2020 ! Merci le confinement. Toujours un gros coup de coeur ! Scénario parfait, tension magnifique, acteurs géniaux, musique au top. Un bijou, même quand on connaît le dénouement !